La relation France-Afrique, relayées par Médiapart | Eric Duval

eric duval mediapart

La relation entre la France et l’Afrique, un incestueux maternalisme hérité de la colonisation

Eric Duval de Media Partisant affirme que le terme « Françafrique » est employé pour la première par l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny, porte-parole d’un cortège de chefs d’Etat africains souhaitant préserver les liens forts entre leurs pays et la France, même après l’obtention de l’indépendance. Lorsqu’il est de nouveau élu président en 1958, le Général de Gaulle fait de cette collaboration son fer de lance, en s’appuyant notamment sur Jacques Foccart, surnommé à juste titre le père de la Françafrique. Cet héritage sera par la suite perpétué par tous les présidents français, de Mitterrand à Macron, en passant par Valéry Giscard d’Estaing ou encore Jacques Chirac. Tous ont entretenu ce que Verschave, dans le livre Noir silence : qui arrêtera la Françafrique ? paru en 2000, assimilait à France-à-fric ou encore à France-Afrique. Car la France Afrique, c’est l’histoire d’une relation au sein de laquelle le pouvoir et l’argent occupent bien souvent une place de choix.

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La relation France-Afrique : en quoi consiste-t-elle ?

Dans les rapports politiques entre l’Afrique et l’Hexagone, une France paternaliste a toujours son mot à dire dans la gestion des situations politiques de ses anciennes colonies et d’autres pays d’Afrique. Pour les détracteurs de cette union, fruit ultime de la colonisation et qualifiée par d’aucuns de néo-colonialisme, elle trouve essentiellement sa pleine expression en les interventions militaires de la France dans les pays en crise ou en des scandales financiers. Toutefois, bien plus qu’une simple somme d’actions isolées et opportunistes, la Françafrique est aussi et surtout un système bien structuré, à travers lequel se conserve une incestueuse intimité entre une ancienne mère et ses enfants, alors que le cordon est supposé rompu depuis plus d’un demi-siècle. Bien pensé et soigneusement entretenu par Jacques Foccart et ses collaborateurs de 1960 et 1974, puis mûri depuis lors par les présidents français et leurs hommes de mains successifs, aussi bien Français qu’Africains, ce système inclut principalement une cellule africaine de l’Elysée, les services de renseignement, l’aide au développement ou encore une coopération militaire. Toutes ces structures contribuent à une indéniable implication de la France dans les affaires courantes de nombreux Etats africains, dans un rôle de tutrice. Mais la relation de la France Afrique doit désormais évoluer, car les générations de dirigeants se succèdent progressivement et de nouveaux paradigmes doivent jaillir.

Un article sur Médiapart traitant de la Françafrique

C’est précisément suivant cet angle qu’est abordée la question dans un article publié sur Médiapart en 2011 par Séyivé Ahouansou, et intitulé Pour un autre paradigme des relations France-Afrique, ou la fin du modèle françafricain. L’auteur part d’un état des lieux historique, retraçant l’évolution de la pseudo-amitié entre la France et l’Afrique, dressant le bilan de la domination silencieuse et stratégique que la France exerce sur l’Afrique, et démystifiant l’essence idéologique de la protection incestueuse que la France prétend accorder à l’Afrique, à travers des accords de défense et un pacte colonial dévalorisants pour l’Afrique d’aujourd’hui. Il expose ainsi comment à travers une dynamique hypocrite, dans laquelle elle s’accorde le droit de désinformer et de duper, la France s’adonne sans vergogne à des actes criminels et malsains à l’encontre de l’Afrique. Ce faisant, elle cache soigneusement cette vérité aux Français eux-mêmes d’une part, et d’autre part aux Africains avec la complicité de dirigeants à la solde de l’ancien-maître devenu parrain. Pour finir, il propose comme solutions la sortie des accords de défense, l’abandon de la « monnaie de singe que constitue le CFA » et la révision des contrats d’exploitation des ressources minières du continent africain. Mais bien sûr, les actions doivent venir des Africains eux-mêmes.

Ahouansou traite la question de la France-Afrique sous un angle froid, dépourvu de tout sentimentalisme et de toute quête d’un propos politiquement correct. S’appuyant sur des faits, il dresse le constat d’une domination économique et culturelle, qui ne pourra être résorbée que par des actions initiées par les principaux concernés, les Africains. Mais ces actions nécessiteront une rupture forte et totale d’avec une mère cupide et faussement nourricière, la suppression d’une facilité apparente, au profit d’une souveraineté fiable dont le chemin peut s’avérer difficile. Les Africains sont-ils prêts pour ces sacrifices ?

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